2017 : bilan de la négociation collective en France

Le bilan de la négociation collective 2017 a été présenté, lors de la Commission nationale de la négociation collective (CNNC) du 26 octobre 2018, aux partenaires sociaux par le Directeur général du travail. Ce bilan expose les grandes tendances de la négociation collective en 2017 dans une approche qualitative et quantitative, l’action de l’Etat pour accompagner et stimuler la négociation, ainsi que le contexte législatif et réglementaire dans lequel elle s’est déroulée.

Présentation du Bilan de la négociation collective 2017

Selon le Ministère du travail, l’année 2017 constitue une étape majeure dans la construction d’un nouveau mode de régulation des relations professionnelles dans lequel, l’ordre conventionnel construit par les acteurs de la négociation collective eux-mêmes, occupe une place centrale. Pour lui, le double mouvement d’élargissement des marges de manœuvre des partenaires sociaux pour négocier, en particulier au plus près des salariés, et de consolidation de leur représentativité se prolonge avec les transformations impulsées par les ordonnances.

Ensuite les partenaires sociaux ont présenté leur analyse des négociations collectives en 2017. La CFDT est intervenue sur :   

  • la responsabilité que lui confère sa 1ère place d’organisation syndicale pour les salariés du privé ;
  • la concertation sur les ordonnances ;
  • les difficultés rencontrées par les équipes CFDT quant à la mise en place des CSE.

Les autres organisations syndicales (CGT, FO, CFTC, CFE-CGC) ont également centré leurs interventions sur la concertation sur les ordonnances.

Les organisations patronales (MEDEF, CPME, U2P et UNAPL) ont quant à elles salué la souplesse en matière de dialogue social qu’a introduite les ordonnances. Tout en insistant sur les 3 niveaux de négociations que sont : l’interprofessionnel national, la branche professionnelle, l’entreprise.

Quelques chiffres des négociations collectives 2017

 

Dans les branches professionnelles

Taux de signature des accords interprofessionnels et de branche par organisation syndicale (taux en %)

 

  CGT CFDT CGT-FO CFTC CFE-CGC
2014 30,2 85 71 72,7 72,7
2015 34,9 86,4 68 75 72,9
2016 32,5 88,6 69 76,8 72,3
2017 33,2 86,6 71,4 74,2 68,7

 

On ne note pas d’évolution significative au niveau de ces chiffres sauf peut-être pour la CFE-CGC.

Thèmes abordés par les avenants et accords professionnels signés en 2017

 

Thèmes Nombre de textes

pour

2016

Nombre de textes pour 2017
Salaires 401 480
Condition de négociation / modalités de conclusion des accords (accords de méthode, accords avec salariés mandatés, commissions paritaires (CPPNI), règles de négociation….) 229 319
Condition d’application des accords 142 188
Egalité professionnelle hommes-femmes 135 169
Système et relèvement de primes 143 163
Formation professionnelle / apprentissage 177 153
Retraite complémentaire et prévoyance 155 128
Elément du contrat de travail (embauche, période d’essai, CDD, travail temporaire, congés (maternité, adoption, éducation enfant), licenciement (préavis, licenciement), démission) 99 86
Temps de travail 65 67
Droit syndical 48 66
Système et relèvement de salaires 63 58
Conditions de travail, hygiène et sécurité 48 52
Maladie 71 47
Classifications 65 41

On constate une augmentation du nombre d’accords de branches et d’avenants par rapport à 2016 (2017 au lieu de 1841). C’est le thème de la négociation sur les conditions de négociation/modalités de conclusion des accords qui a subi la plus forte hausse (près de 40 %), ce qui peut s’expliquer par l’obligation légale pour les branches de mettre en place leur Commission paritaire permanente de négociation et d’interprétation (CPPNI). Le second thème est celui des Salaires (près de 20 %).

Dans les entreprises

Nombre de textes signés dans les entreprises en 2017 et évolution par rapport à 2016 selon le mode de conclusion

 

Types de textes Textes signés

en 2017

Evolution sur un an
Accords d’entreprise signés

Dont textes signés par des délégués syndicaux ou des salariés mandatés

Dont textes signés par des élus du personnel

38 021

 

32  271

 

7 186

– 10 %

 

– 7,9 %

 

– 20 %

Textes ratifiés par référendum 12 808 – 18,6 %
Textes signés par l’employeur uniquement (décisions unilatérales) 10 562 –  21%
Total des textes enregistrés 61 391 – 13, 6%

 

Il est à noter que :

  • Le nombre d’accords d’entreprise conclus en 2016 a baissé de près de
    16 % (61 391 au lieu de 71 028) et cela quel que soit le mode de conclusion. La baisse par rapport à 2016 résulte notamment de la périodicité des négociations, telles que sur l’égalité professionnelle. D’ailleurs, le nombre d’accords conclus revient à celui de 2015 qui était de 61 169.
  • Les thèmes ayant subi la plus grande baisse sont l’épargne salariale (- 20 %) et la protection sociale (- 19 %).
  • Les thèmes les plus abordés ont été : les salaires et primes (près d’un tiers des accords), les conditions de travail notamment sur le droit à la déconnexion (+ 82 % par rapport à 2016) et le temps de travail notamment sur sa durée et son aménagement.

 

Propension à signer pour chaque organisation syndicale

 

  2014 2015 2016 2017
CFDT 94 % 94 % 94 % 94 %
CFE-CGC 91 % 92 % 93 % 93 %
CFTC 89 % 89 % 91 % 91 %
CGT 84 % 84 % 84 % 85 %
CGT-FO 89 % 90 % 89 % 91 %
Solidaires Non disponible 69 % 69 % 69 %
UNSA Non disponible 87 % 88 % 88 %
Autres syndicats 16 %      

 

On peut remarquer que le taux de signatures est différent dans les branches professionnelles et dans les entreprises. C’est particulièrement vrai pour la CGT qui ne signe que 33% des accords dans les branches, mais qui signe 85% des accords en entreprise.

 

Intervention CFDT sur le bilan de la négociation collective 2017

Pour la CFDT, l’année 2017 aura été en demi-teinte en ce qui concerne le dialogue social.

En effet, si la première place qu’occupe désormais la CFDT chez les salariés du secteur privé confirme que son type de syndicalisme, force de proposition pour transformer le quotidien des salariés, capable de s’engager dans la négociation et d’obtenir des résultats concrets, répond aux attentes des salariés, cette première place lui confère une grande responsabilité. Pour la CFDT, le dialogue social de qualité doit impérativement s’appuyer sur des organisations syndicales solides et reconnues à chaque niveau pertinent de négociation.

Pour cela, la mise en œuvre de la représentativité syndicale telle qu’issue de la loi du 20 août 2008 peut être optimisée. Cela passe notamment par son application complète dans tous les lieux pertinents comme dans les Commissions paritaires de branche professionnelle ou encore par l’intégration de l’audience syndicale comme critère de répartition des fonds opérée par l’Association de Gestion du Fonds Paritaire National (AGFPN).

De plus pour la CFDT, l’assouplissement des conditions de désignation du délégué syndical par la mesure de contournement de la règle des 10%, introduit par un amendement lors des discussions sur le projet de loi de ratification des ordonnances, est pour la CFDT une menace importante sur les dispositions introduites par la loi de 2008. En effet, cet assouplissement, sans concertation avec les partenaires sociaux, est une attaque à la légitimité des élus auprès des salariés et à l’heure de la remise en cause des corps intermédiaires, cette mesure est fort dommageable.

Année en demi-teinte par la promulgation des ordonnances, en effet la CFDT – même si elle n’était pas demandeuse d’une nouvelle réforme du dialogue social – a abordé la concertation en considérant qu’elle était l’occasion d’avancer vers des relations sociales marquées par plus de maturité, plus de responsabilité, plus de démocratie sociale.

Car pour la CFDT, c’est bien de la qualité du dialogue social que dépendent à la fois le bien-être au travail des salariés et le dynamisme économique des entreprises. Pour la CFDT, l’entreprise est un lieu de création collective qui implique un partage du pouvoir, la confrontation des logiques et la recherche de compromis entre les employeurs et les salariés représentés par les organisations syndicales. Pour la CFDT, dans l’exercice de leur mandat, les représentants des salariés sont affranchis du lien de subordination et sont porteurs de l’intérêt général.

Car si la CFDT a accueilli favorablement certaines mesures phares des ordonnances comme la décentralisation de la négociation au plus près des salariés et des problèmes à résoudre ou encore la sanctuarisation du rôle pivot de la branche professionnelle entre la loi et les accords d’entreprise, la CFDT considère qu’elles restent déséquilibrées par d’autres mesures qui représentent un danger, en particulier dans les petites entreprises.

D’ailleurs, la CFDT a déploré que le renforcement de la négociation d’entreprise ne soit pas accompagné des moyens nécessaires pour qu’elle soit partout équilibrée et loyale : en particulier la possibilité laissée à l’employeur de négocier sans un élu syndiqué ou mandaté dans les moins de 50, et pire, le pouvoir unilatéral accordé à l’employeur dans les entreprises de moins de 21 salariés, assorti d’une pseudo-consultation des salariés. Pour la CFDT, il apparait que le législateur prête au patronat une maturité qu’il n’a pas.

Enfin, la CFDT n’a pas compris pourquoi le gouvernement a choisi la marche forcée pour la fusion des instances alors que c’est aux acteurs de terrain de rechercher la meilleure solution pour encadrer le dialogue social d’entreprise.

Au-delà de cette incompréhension, la CFDT craignait que cette fusion diminue significativement les moyens alloués aux élus d’entreprise pour leur permettre de remplir correctement leurs missions. Un an après, cette crainte est confirmée, car nombre d’entreprises ne veulent pas créer de supra légal pour les élus. Au travers de cette intervention, nous interpellons donc les organisations patronales pour qu’elles travaillent à lever les freins sur ce sujet avec leurs entreprises adhérentes.

En revanche, le raccourcissement du calendrier de la restructuration des branches de moins de 5 000 salariés, introduit par les ordonnances, a permis une prise de conscience par les branches de la nécessité de se restructurer. Pour la CFDT, les branches doivent relever un double défi : se restructurer et refonder leur norme sociale notamment sur la qualité de l’emploi, la formation professionnelle et l’apprentissage. Elles doivent repenser leur mode de fonctionnement pour appréhender les enjeux économiques, sociaux et environnementaux auxquels font face les entreprises de leur champ dans le but de proposer un parcours professionnel sécurisé aux salariés. Mais pour la CFDT, ce chantier ne touche pas que les « petites » branches…

Autre sujet concernant les branches et les ordonnances : la mise en place d’un groupe d’experts afin d’évaluer les risques sociaux-économiques de l’extension d’un accord. Si ce recours à l’expertise n’est pas systématique, puisqu’il faut que le groupe soit saisi par la ministre ou par une organisation syndicale ou patronale représentative dans la branche et que leur avis n’est que consultatif, il apparait comme un hiatus pour la CFDT. En effet, un accord collectif est le résultat équilibré, d’après les parties signataires, d’une négociation loyale dans la branche. Il n’appartient donc pas à des experts, notamment économiques, de juger leur travail. La CFDT souhaite donc que ce groupe d’expert soit le moins possible sollicité, d’autant qu’une organisation tant patronale que syndicale minoritaire peut se saisir de cette opportunité pour faire reculer la date d’application d’un accord et donc pénaliser les droits des salariés.

Autre concertation en 2017 celle sur les retraites, lors de son lancement la CFDT a rappelé qu’il est de la responsabilité collective des partenaires sociaux et du gouvernement de rendre le système des retraites lisible et surtout équitable entre tous les salariés quel que soit leur parcours professionnel ou leur sexe. C’est pour cela que la CFDT à la suite de son enquête « Parlons Retraites » a réalisé et diffuse son manifeste concernant cette future réforme d’ampleur. Autre évènement marquant, la mise en place d’une nouvelle convention assurance chômage en mars 2017 ; preuve que lorsque les partenaires sociaux négocient et s’engagent ils confortent ou créent des droits pour les salariés.

L’année 2017 aura donc été rythmée par nombre de concertations. La CDFT souhaite que l’année 2018, puis 2019, permettent aux partenaires sociaux, par leur agenda autonome, ou au travers de négociations encadrées de faire avancer les droits des travailleurs afin que ces derniers puissent faire face aux évolutions tant technologiques qu’écologiques auxquelles notre société est confrontée.

 

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