Bilan de la politique sociale : les élus CSE rendent un avis

Comme chaque année les élus du CSE rendent un avis sur la politique sociale AG2R pour l’année écoulée. En conclusion, l’année 2021 s’est traduit, pour la politique sociale du groupe, par une réduction générale de l’emploi, de la politique salariale et une dégradation des conditions de travail. Il manque de vrais moyens pour le recrutement, la politique salariale.

Avis des élus du CSE

Le CSE du GIE AG2R est consulté dans le cadre de l’article L.2323-15 du Code du travail relatif à la consultation sur la politique sociale, l’emploi et les conditions de travail. Celui-ci s’appuie sur le rapport présenté par notre expert Secafi, que nous remercions pour son étude.

Index des sujets traités

Emploi

La décroissance des effectifs est en 2021 de 4,1% (215 CDI en moins) : On compte 300 départs au total (tous contrats) pour 74 entrées. Cette tendance se mesure aussi bien dans l’activité retraite (- 121 CDI) que dans l’activité concurrentielle (- 94 CDI). Globalement, les effectifs de l’UES AG2R ont diminué de 23% depuis 2015. Pres de la moitié du recul des CDI concerne le bassin parisien.

La réduction des effectifs s’amplifie : entre 2020 et 2021, les effectifs en CDI ont baissé de 5,4%. Sur les quatre dernières années (2018-2021) la réduction cumulée est de 10%.

Les motifs de départs restent en majorité les départs en retraite (169). Les licenciements sont en hausse de plus de 60% par rapport à 2020.

La trajectoire de réduction des effectifs de l’UES est supérieure à celle de la branche, avec un recours aux CDD plus élevé.

Si le nombre de CDD dans l’UES est en recul, il en va de même pour les alternants. Le taux fixé de 4% d’embauche n’est pas tenu à lui seul sur l’UES AG2R.

La baisse des effectifs touche toutes les régions et tous les métiers, et plus particulièrement la gestion / relation client (10%) et le commercial (8%). Quelques métiers ont été renforcés (informatique, data, étude, audit interne).

La charge de travail en constante augmentation, corrélée à la réduction des effectifs depuis des années, nous fait craindre une augmentation importante des Risques Psycho Sociaux ainsi qu’une impossibilité pour les salariés de faire réellement valoir leur droit à la déconnexion.

Nous nous alarmons de ce constat, de la hausse sensible des licenciements et de la réduction des effectifs.

La pyramide des âges

La diminution importante du nombre de CDI dans l’UES provoque un autre phénomène : la déformation de la pyramide des âges.

Avec une pyramide des âges élevée (plus de 44% des effectifs à plus de 50 ans, plus élevée que la branche), le départ massif de salariés expérimentés à moyen terme pose la problématique du maintien des compétences et de la transmission des savoirs.

Les élus s’inquiètent de la non prise en compte de ce phénomène par la direction et souhaitent qu’un plan d’action stratégique soit formalisé dans le nouvel accord de Gestion Active et Prévisionnelle des Emplois et Compétences.

La sous-traitance et l’externalisation

La question de la sous-traitance est gérée par les directions métiers sans l’appui d’une vision globale groupe.

La diminution du nombre de CDI est compensée, non pas par une hausse du nombre de CDD, qui diminue également (-12,3% entre 2020 et 2021), mais par un recours plus massif à la sous-traitance.  

Dans le domaine Particuliers de la retraite complémentaire, deux nouvelles activités sont maintenant sous traitées :

  • la pré constitution pour l’équivalent de 40 ETP ;
  • la mise à jour des carrières pour un équivalent de 10 ETP.

Dans la relation client en retraite :

  •  61% des appels sont externalisés, jusqu’à 90% pour les entreprises et 92 % pour le social.

En gestion des frais de santé, l’objectif fixé, et bientôt atteint, est de confier le traitement de 80% des factures des assurés à la sous-traitance. Au total, c’est 40% de l’activité santé qui sera, à terme, traitée à l’extérieur. Concernant la gestion des appels en santé et prévoyance, le pourcentage de salariés internes sur cette activité n’est plus que de 26,9% contre 28,6% en 2020.

Les élus du CSE dénoncent la course au recours à la sous-traitance des activités du groupe.

D’autant que ce phénomène se conjugue à l’augmentation de la gestion déléguée en assurance de personnes. En 2021, la politique de délégation en santé prévoyance n’a cessé de prendre de l’ampleur, alors qu’elle représentait déjà en 2020, 80% du chiffre d’affaires intermédié sur les affaires nouvelles et 30% du chiffre d’affaires total.  

Pour les élus CSE, ce recours massif à des acteurs externes au groupe ouvre la question de nos missions en tant que groupe de protection sociale, et des activités de cœur de métier qui doivent être traitées en interne.

Le groupe AG2R LA MONDIALE doit-il être un simple assureur de risques ou un groupe de protection sociale acteur dans les prestations qu’il doit à ses ressortissants ?

Formation

On note toujours plus de formations en ligne (68% du total des heures de formation pour 90% des stagiaires) avec d’avantages de formations via Teams (SYNCHRONE) et moins de formation e-learning (CAMPUS PRO). Malgré une offre complète sur Campus Pro, ces formations n’ont de libre accès que le nom. En effet, aucune heure n’est accordée aux salariés sur le temps de travail pour qu’ils s’y consacrent alors même qu’on leur demande d’être acteurs de leur parcours professionnel.

Pour les élus, les formations en distanciel ou e-learning doivent s’envisager comme un éventuel complément aux formations en présentiel et non comme une norme.

Selon l’expertise de SECAFI, la transformation profonde de la formation depuis 2020 n’a pas entrainé l’adaptation des indicateurs de suivi et d’évaluation :

  • Il y a peu d’indicateurs de mesure sur les formations suivies : taux d’accès, nombre moyen de sessions par salarié, volume d’heures théoriques suivies … une distinction doit être faite entre les formations obligatoires et celles demandées par les salariés.
  • L’évaluation de la formation repose toujours sur la satisfaction des stagiaires sans d’autres indicateurs identifiés.

Les élus s’interrogent sur le bon aboutissement du process des demandes de formations car 54% des demandes sont refusées.

Les élus constatent la baisse du nombre des formations qualifiantes et certifiantes, alors qu’elles sont considérées comme leviers d’employabilités internes et externes.

Quant aux leviers annexes à la formation permettant le développement des compétences, ils ne concernent que des dispositifs d’accompagnements individualisés.

La formation joue un rôle de plus en plus majeur dans le processus de Parcours Professionnel. Selon la direction, Il apparait aujourd’hui que chaque salarié doit être acteur pour son avenir dans le groupe. Néanmoins, malgré le progrès des process mis à disposition, il manque un élément majeur pour qu’il puisse y arriver, le temps. Les élus réitèrent leur demande de mise en place d’un crédit d’heures dédié à la formation et individualisé.

Les élus remarquent de nouveau l’absence de projets sur la prise en compte du maintien des compétences et de la transmission des savoirs.

Conditions de travail

Plusieurs baromètres proposés aux salariés par la direction et les organisations syndicales ont permis de mesurer l’engagement des salariés et leurs perceptions des conditions de travail.

Les élus ont observé que si une majorité des salariés se sent personnellement impliquées dans la bonne marche de leurs services et de ses résultats, force est de constater qu’au niveau de l’entreprise il existe un déficit de confiance envers le groupe et dans l’avenir des métiers.

Autre enseignement des baromètres : le peu de reconnaissance du travail individuel. En majorité, les salariés répondent que la valeur de leur travail demeure insuffisamment reconnue.

Si les salariés jugent majoritairement qu’ils ont une autonomie suffisante, en revanche, presque la moitié d’entre eux rencontre des difficultés générées par une augmentation au fil du temps de la complexité des tâches à réaliser par rapport à leur temps de travail.

Une majorité d’entre eux dépasse le temps de travail effectif lorsqu’il y a une tâche à terminer dans l’urgence. Malgré une dégradation des conditions de travail, les élus notent que le baromètre indique aussi un réel investissement personnel et un professionnalisme des salariés AG2R.

Une minorité des salariés estime utiliser au mieux ses capacités dans son travail, tandis qu’une majorité indique que ses besoins de formation ne sont pas pris en compte.

Une minorité des salariés estime que leur travail leur procure une grande satisfaction et une majorité dit être épuisée moralement ou soumis au stress.

Notons que le baromètre de la direction globalise les réponses des salariés AG2R et de La Mondiale. Aucune présentation n’ayant été faite par entités séparées malgré nos demandes.

Ces baromètres ont le point commun de tous souligner une dégradation très nette des conditions de travail.

Absentéisme

Cette dégradation des conditions de travail se traduit par un taux d’absentéisme maladie important (5,5%). Dans quatre régions, ce taux atteint même les 10%.

Les élus constatent que cette augmentation est décorrélée du vieillissement des effectifs ; car on mesure une très forte augmentation de l’absentéisme chez les moins de 30 ans en 2021.

A ce titre, les élus déplorent l’absence d’une politique volontarisme de prévention de l’absentéisme de la part de la direction.

Les élus comptent sur la négociation d’un accord de Qualité de Vie au Travail pour inverser la dégradation des conditions de travail. Il s’agira de trouver de véritables solutions pour sortir d’une situation fortement dégradée. 

Cependant, les élus soulignent qu’un accord seul ne suffira pas pour améliorer le niveau d’engagement des salariés et instaurer de bonnes conditions de travail.

Davantage de moyens doivent être dégagés pour agir sur les différents sujets abordés dans cet avis : politique salariale, le niveau de l’emploi en interne, gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences, égalité professionnelle, formation des salariés.

Egalité professionnelle

L’égalité professionnelle semble toujours inatteignable dans l’UES ; Face à des métiers très féminisés, sans recrutements externes importants, la politique soi-disant volontariste de l’UES ne corrige pas les écarts.

Alors que 82% de la catégorie employé sont des femmes, le taux de femmes cadres (47,3% chez AG2R) évolue très peu, et se situe en deçà des moyennes du secteur. On observe également un véritable « décroché » du taux de femmes sur la classe 8 (21%) et les emplois hors classe (23%). La tendance des 5 dernières années montre une dégradation nette de la situation. 

Des écarts significatifs de rémunération s’observent en défaveur des femmes sur les emplois agents de maitrise et cadres (hors cadres DSI), allant de 13,4 % (sur le salaire de base moyen) dans la gestion à 16,7% sur les emplois fonctionnels. 

Les actions mises en place (accentuation des augmentations individuelles) ne semblent pas porter leurs fruits.

Les salariés à temps partiels (composées à 93% de femmes) ont un taux d’accès à la formation plus faible, et on constate toujours des disparités dans les taux d’augmentations individuelles et les taux de promotions par rapport aux salariés à temps plein.  

Les élus constatent que ce sujet n’a pas évolué par rapport aux années précédentes. Les actions de sensibilisations qui auraient dû être mises en place n’ont soit pas été suffisantes, soit pas été déployées du tout.

Politique salariale

La baisse des frais de personnel a encore été importante en 2021 (-2%). Depuis 2015, les frais ont diminué de 19%, soit une économie de 97M€.

Si l’essentiel de cette baisse est dû à la diminution des effectifs, une politique salariale atone participe également à cette situation.

Seuls 37% des salariés en CDI ont bénéficié d’une mesure d’augmentation collective de leur salaire en 2021.

L’UES se dirige de plus en plus vers une politique de mesures salariales individuelles, au détriment d’une politique collective.

Ainsi, l’enveloppe consacrée aux augmentations collectives n’a représenté en 2021 que 14% de l’enveloppe totale de la politique salariale, contre 41% pour les augmentations individuelles.

Dans cette politique d’augmentations individuelles, les élus déplorent qu’une place de plus en plus importante soit donnée aux primes exceptionnelles, avec une nette diminution du pourcentage de salariés augmentés en 2021 par rapport à 2020.

Globalement, alors que le taux d’inflation a été de 2,8% en 2021, le salaire moyen dans l’UES AG2R n’a augmenté que de 0,8%. 

GAPEC

L’objectif principal de l’accord GAPEC était de disposer d’outils opérationnels pour :

– accompagner les salariés dans l’évolution de leur emploi et dans leur mobilité fonctionnelle et/ou géographique ;

– anticiper les évolutions dans le contenu des fonctions ;

– disposer d’outils de prospectives en termes de volume d’emplois pour mieux anticiper les changements et préparer l’accompagnement des salariés. 

Sur les deux premiers sujets, l’accompagnement individuel des salariés et l’anticipation des évolutions de contenus de fonctions, les élus concluent que la feuille de route est plus ou moins respectée. Un lourd travail de recensement, d’analyse et référencement a été effectué par la DRH en lien avec les directions métiers.

En revanche, les éléments d’analyse sur la prospective en termes de volumes d’emploi sont les grands absents, ainsi que la pesée des emplois.

Les élus regrettent que l’analyse de l’évolution quantitative de l’emploi ne soit pas présentée à l’observatoire des métiers avec tous ses paramètres. 

Ainsi, les études d’impacts d’éléments exogènes comme le transfert du recouvrement ne sont pas intégrées dans la présentation. En gestion santé-prévoyance, la stratégie de recours à la sous-traitance et celle de la gestion déléguée n’a pas été évoquée, laissant dans l’ombre de ce fait les impacts sur l’emploi. Autre exemple, le recrutement dans le secteur commercial, aucune corrélation entre les recrutements en région, les potentiels commerciaux et les besoins n’a été établie.

Les élus se demandent comment, dans ces conditions, établir des prospectives sérieuses sur les niveaux d’emploi ?

Conclusion

En conclusion les élus notent les points saillants suivants, dans un contexte de persistance des contraintes covid, bien que moins impactantes qu’en 2020, mais aussi de mesures de régulations budgétaires avec une baisse des recrutements externes, et une maîtrise des déplacements :   

  • Une trajectoire de réduction des effectifs (particulièrement en assurantiel) dramatique,  compensée par un recours à la sous traitance ;
  • Une volonté d’embauches en retraite ralentie par des difficultés de recrutement, la politique salariale d’embauche restant plus faible que chez nos concurrents ;
  • La pyramide des âges élevée laisse craindre des départs de compétences qui ne pourront pas être compensées ;
  • Des baromètres soulignant un engagement faible au groupe et une dégradation des conditions de travail ; ce constat nous laisse craindre un désengagement des salariés et une hausse des départs dans les prochaines années. L’augmentation de plus de 60% des licenciements est également un facteur alarmant ;
  • Une charge de travail en augmentation qui laisse redouter de possibles RPS et un risque pour le droit à la déconnexion ;
  • Une augmentation des formations à distance, la mise en place des Campus Pro, mais un taux de refus qui reste élevé ; Quelles mesures de l’efficacité des formations à distance ?
  • Le taux d’absentéisme reste important, surtout chez les jeunes de moins de 30 ans et dans certaines régions ciblées ;
  • Il manque une vraie politique volontariste pour réduire les écarts salariaux égalité professionnelle ;
  • Un accord GAPEC insuffisamment déployé, il reste un manque sur les trajectoires d’effectifs ; Malgré un gros travail de prospective sur le contenu des emplois, Il faudrait une vraie réflexion sur la pertinence de la mise à disposition d’une multitude d’outils, sans stratégie, ni temps dédié pour y accéder. Quels seront les moyens mis en place pour déployer ces éléments au plus près du terrain et des salariés ?
  • Une politique salariale insuffisante, orientée sur les augmentations individuelles au détriment des augmentations collectives.

En conclusion, l’année 2021 se traduit, pour la politique sociale du groupe, par une réduction générale de l’emploi, de la politique salariale et une dégradation des conditions de travail. Il manque de vrais moyens pour le recrutement, la politique salariale.

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gellion
gellion
2 mois il y a

Merci pour cette publication.Section syndicale dans une autre branche, j’ai apprécié de pouvoir m’inspirer de cet avis.

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