Réforme des retraites : une semaine décisive.

Alors que, pour la huitième fois le 15 mars, les organisations syndicales appellent à la grève et aux manifestions, l’exécutif refuse toute forme de discussion et s’entête à vouloir faire passer sa loi le plus vite possible. L’intersyndicale invite les députés à prendre leurs responsabilités.

À la fin de la semaine, on devrait savoir ce que devient la réforme des retraites. Non sans mal, le Sénat a fini par adopter un texte, le 11 mars, avec 195 voix pour et 112 contre. Ce résultat peu glorieux a nécessité l’usage de l’article 44.3, c’est-à-dire le recours à un vote bloqué sur une grande partie du projet de loi. Sans surprise, les sénateurs ont voté le décalage de l’âge légal à 64 ans et l’accélération de la loi Touraine. Sans surprise, car la majorité de droite au Sénat ne s’est jamais cachée de soutenir le projet du gouvernement. Ils sont même allés plus loin pour faire de cette réforme « une réforme de droite », selon les termes du président du groupe Les Républicains, Bruno Retailleau.

Ce que contient le texte des sénateurs

Les sénateurs ont ainsi voté – contre l’avis du gouvernement – la création d’un CDI senior, en l’occurrence un nouveau contrat exonéré de cotisations familiales destiné aux salariés âgés d’au moins 60 ans. À charge pour les partenaires sociaux d’en définir les modalités d’application branche par branche. Même si cette invention, unanimement décriée par les organisations syndicales, n’a que peu de chance de rester en l’état, elle révèle une fois de plus la pauvreté des propositions censées améliorer le taux d’emploi des seniors. En parallèle, ces mêmes sénateurs ont allégé les contraintes des entreprises en votant en faveur d’un index senior… mais seulement dans celles de plus de 300 salariés, contre 50 dans la version de l’Assemblée nationale.

Les sénateurs se sont également attaqués à la question des droits familiaux. Encouragés par le gouvernement, cette fois-ci, ils ont voté le principe d’une surcote à partir de 63 ans pour les femmes bénéficiant au moins d’un trimestre en plus quand elles ont eu un ou plusieurs enfants. L’idée est de donner un droit supplémentaire aux femmes qui passaient pour les grandes perdantes de la réforme, c’est-à-dire les femmes qui pouvaient revendiquer quarante-trois années de cotisation avant l’âge de 64 ans grâce aux trimestres acquis au titre des enfants. Enfin, le Sénat, avec l’accord du gouvernement, a amélioré le dispositif carrière longue en donnant la possibilité d’un départ anticipé à 63 ans aux personnes qui ont commencé à travailler entre 20 et 21 ans.

Commission mixte paritaire le 15 mars

Prochaine étape le mercredi 15 mars. Sept sénateurs et sept députés, lors d’une commission mixte paritaire (CMP), doivent tenter de se mettre d’accord sur un texte commun aux deux assemblées. S’ils y parviennent, le compromis doit ensuite être voté par les deux chambres, normalement dans la foulée, soit le jeudi 16 mars. S’ils ne se mettent pas d’accord en CMP, c’est l’Assemblée nationale qui, in fine, devra trancher.

Quel que soit le scénario qui l’emportera (un texte issu de la CMP ou non), le gouvernement doit opérer un choix dans les prochains jours : se ménager une pause et remettre tout le monde autour de la table (option peu probable, mais qui a évidemment les faveurs des organisations syndicales) ; faire voter les députés, au risque de perdre le vote et provoquer l’enterrement de la réforme ; dégainer une nouvelle fois l’article 49 alinéa 3, qui permet l’adoption de la loi sans vote en engageant la responsabilité du gouvernement.

« Comme on dit au basket, on est dans le money time, le moment où tout se joue, résume Yvan Ricordeau, le secrétaire national de la CFDT chargé des retraites. C’est pourquoi l’intersyndicale appelle à une participation massive le 15 mars ». Tout l’enjeu est de convaincre les derniers députés hésitants de se ranger du côté des organisations syndicales. En effet, le gouvernement, le groupe Renaissance ou encore Les Républicains ont beau faire des calculs depuis plusieurs jours, personne n’a aujourd’hui l’assurance qu’une majorité est en train de se dégager à l’Assemblée nationale.

Bientôt un référendum d’initiative partagée ?

La contestation de la réforme pourrait aussi passer par une consultation citoyenne, réclamée dès le 11 mars par l’intersyndicale. La Constitution prévoit en effet qu’un cinquième des membres du Parlement peuvent demander la tenue d’un référendum d’initiative partagée avant le vote de la loi. Si le Conseil constitutionnel valide cette procédure, elle devra recevoir le soutien, dans les neuf mois, d’un dixième du corps électoral, soit plus de 4,5 millions de personnes… Alors que la pétition intersyndicale a déjà atteint plus d’un million de signatures en quelques semaines, les organisations syndicales sont prêtes à se mobiliser pour rassembler les signatures nécessaires et ainsi faire échec à cette réforme, toujours aussi massivement rejetée par la population.

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